Le 24 septembre, dans la commune de Charly, en banlieue lyonnaise, une station botanique expérimentale Nikolaï Vavilov a été inaugurée sur le territoire de l’ancien domaine bourgeois Melchior Philibert.

L’objectif du projet est d’étudier les possibilités d’adaptation au changement climatique et d’amélioration de la sécurité alimentaire en France. La recherche se concentrera sur les cultures fruitières les plus résistantes et pouvant fournir de la nourriture aux habitants de la région en cas de changement des conditions climatiques.

L’ethnobotaniste Stéphane Crozat, au cours de ses recherches sur l’histoire de la botanique de la région Rhône-Alpes, a constaté que la France ne possède plus une immense réserve de plantes, qui, comme le décrivent d’anciens ouvrages de référence et catalogues, existait il y a cent ans. Les tentatives pour trouver des traces de ces plantes fruitières, cultivées par les agriculteurs français du siècle dernier, l’ont amené à l’Institut national des ressources génétiques des plantes nommé d’après N.I.Vavilov (VIR). Là, le chercheur a trouvé les graines de nombreuses plantes « manquantes ».

Ainsi, en 2014, débute l’histoire d’une coopération étroite entre le Centre de ressources de botanique appliquée (Lyon) et le VIR, avec notamment des expéditions conjointes de recherche de plantes, des expérimentations sur leur culture dans différentes conditions climatiques et des sélections.

A l’instar des botanistes russes, Stéphane Crozat et son équipe ont implanté leur propre station aux portes de Lyon, où ils expérimentent les propriétés des graines trouvées lors d’expéditions et d’échanges avec l’Institut Vavilov et d’autres banques de graines, identifiant les plus résistantes, les plus rustiques, les plus saines et les plus savoureuses plantes.

Le projet ne se limite pas à la botanique. Il comprend également des aspects urbains, pédagogiques et paysagers. Ainsi, outre le VIR, l’Ecole Urbaine de Lyon et l’Institut Michel Serres sont également partenaires scientifiques du projet.

Il est important de noter que les militants du nouveau Centre de ressources sont guidés par la philosophie de Vavilov, à savoir, l’attitude envers le patrimoine biologique en tant que patrimoine commun, qui devrait être accessible à tous et travailler pour le bien de la société, sans être privatisé par des entreprises particulières. Les plantes sélectionnées ou séquencées à la station seront données aux agriculteurs de la région pour une utilisation ultérieure à la ferme.

Au fil du temps, une équipe de personnes partageant les mêmes idées, appelée le Collectif Vavilov, s’est constituée autour du projet. Il comprend le Centre de ressources pour la botanique appliquée, la société Térideal (fournissant l’équipement technique pour le travail) et le Fonds de dotation de Natura, qui a pour vocation d’attirer les fonds au projet.

L’une des actions pédagogiques du Collectif Vavilov est la création du jardin Vavilov en France sur la base d’entreprises commerciales ou dans des lieux publics. Ainsi, la Banque Crédit Agricole assure non seulement un financement partiel du projet, mais a également ouvert son propre potager éponyme dans son bureau central, où elle cultive des fruits à partir de graines obtenues auprès du Centre de ressources. Il existe déjà cinq jardins de ce type en France. Chacun d’eux comprend un « carré russe » avec des récoltes apportées de Russie, un « carré local » avec les cultures de sa propre région, ainsi qu’une « collection sauvage » — avec des plantes sauvages « apprivoisées » par l’homme et donnant lieu à des cultures agricoles cultures.

En Russie, l’idée des jardins Vavilov a trouvé un soutien, elle a été mise en œuvre dans les écoles : les élèves et les enseignants s’occupent des plantes.

La mission des jardins Vavilov est d’impliquer le public dans la conservation et la restauration des cultures végétales, d’attirer l’attention sur le problème de l’adaptation des plantes fruitières et de l’agriculture au changement climatique, d’expliquer l’importance fondamentale de l’agriculture pour la survie de l’humanité.

L’inauguration de la station s’est déroulée en présence d’Alexandre Zavarzine, Directeur Adjoint du VIR, Bruno Bernard, Président de la Métropole de Lyon, Jérémy Camus, Vice-Président de la Métropole de Lyon pour l’Agriculture, Jean-Pierre TAITE, vice-président à l’agriculture de la région Auvergne-Rhône-Alpes, Olivier Araujo, maire de la ville de Charly.

L’échange traditionnel de jeux de graines a eu lieu, ainsi que la plantation symbolique d’épeautre dans l’une des plates-bandes. Tous les invités ont pris part à la cérémonie. Dans son discours, Alexandre Zavarzine a souligné le symbolisme du moment — une fois que Nikolaï Vavilov a fondé le Bureau de botanique appliquée en Union soviétique, dans le cadre duquel il a effectué un certain nombre d’expéditions pour collecter des graines, notamment en France. Le transfert des graines qu’il a ensuite récoltées au Centre de ressources français de botanique appliquée clôt en effet le cycle historique. « Il est très important pour nous que l’équipe Vavilov soit guidée par la même philosophie que Nikolaï Ivanovich a promue à son époque : l’importance de préserver le patrimoine biologique et d’assurer son accessibilité à la population. »

Alexandre Zavarzine a offert au Collectif un portrait de Nikolaï Vavilov, qui décorera les locaux de la station et symbolisera la coopération russo-française dans le domaine de l’agriculture.

A l’attention des invités a été également présentée la bande dessinée « Nikolaï Vavilov à la recherche des trésors de l’humanité », préparée par le Collectif Vavilov pour l’inauguration de la station (auteurs : journaliste Sandrine Boucher et artiste Mathieu Ferrand).